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Le terrible dĂ©cret qui, pour la seconde fois en moins de deux siècles, allait faire tomber sur l’Ă©chafaud une tĂªte couronnĂ©e, et affliger la France d’un attentat semblable Ă celui qui avait effrayĂ© l’Angleterre, Ă©tait prononcĂ©. Les sollicitations Ă©loquentes des trois dĂ©fenseurs du roi Louis XVI, condamnĂ© Ă mort, avaient en vain invoquĂ© pour l’auguste proscrit le jugement suprĂªme de la nation.
Ce recours Ă la puissance populaire n’avait pas eu un sort plus heureux que la proposition des Girondins.
L’appel au peuple avait Ă©tĂ© dĂ©finitivement rejetĂ©. La souverainetĂ© que lui attribuaient ses mandataires n’Ă©tait plus pour eux qu’un vain mot.
Ainsi, par un effrayant abus de pouvoir, ils s’Ă©rigeaient Ă la fois en souverains, en lĂ©gislateurs et en juges, rĂ©unissant des fonctions dont la confusion a toujours constituĂ© la plus Ă©pouvantable tyrannie.
Pour prĂ©cipiter le supplice, ils osent invoquer l’humanitĂ©, comme si la promptitude du meurtre en diminuait l’horreur. Cette cruautĂ© hypocrite Ă©choue cependant contre les efforts des dĂ©putĂ©s plus humains qui, le 19 janvier, rĂ©ussissent Ă faire discuter la question du sursis.
C’est une dernière planche Ă laquelle s’attachent ceux qui voudraient sauver le Roi. Brissot et l’AmĂ©ricain Thomas Payne veulent inutilement faire prĂ©valoir les conseils d’une politique Ă©clairĂ©e : des rugissements de fureur leur imposent silence. Toutefois, sur 721 votants, 310 n’ont pas craint d’opiner pour le sursis, et le rejet n’est prononcĂ© que de 35 voix.
Ainsi fut irrĂ©vocablement dĂ©cidĂ© le sort de l’infortunĂ© monarque.
Louis XVI, pendant toute la durĂ©e de sa dĂ©tention, n’avait opposĂ© aux outrages dont on l’abreuvait, lui et sa famille, qu’une rĂ©signation et une douceur d’Ă¢me qui ne se dĂ©mentirent jamais. Ses adversaires mĂªme se sentirent souvent attendris malgrĂ© eux. Sa bontĂ© les dĂ©sarma plus d’une fois. « Mes ennemis, disait ce prince Ă M. de Malesherbes avec une abnĂ©gation qui avait aussi sa noblesse, veulent me donner de la cĂ©lĂ©britĂ© : j’avais besoin de mes malheurs pour valoir quelque chose, et, grĂ¢ce au ciel, on ne m’en laisse pas manquer. »
Il ne se fit pas un moment illusion sur le sort qui l’attendait, et ne s’occupa, pendant son procès, qu’Ă dĂ©fendre sa mĂ©moire contre d’odieuses calomnies.
Dès le commencement de la rĂ©volution il avait toujours eu sous les yeux l’histoire de Charles 1er. PersuadĂ© que ce prince s’Ă©tait perdu par la rĂ©sistance, il avait espĂ©rĂ© se sauver par sa condescendance ; aussi il ne se permit jamais qu’une lutte passive, et encore seulement lorsqu’il y crut sa conscience intĂ©ressĂ©e. On s’est Ă©tonnĂ© de son respect pour les pouvoirs que la Convention s’Ă©tait arrogĂ©s : on lui a imputĂ© cette rĂ©signation Ă faiblesse. Il fut dirigĂ© par un sentiment plus honorable et plus dĂ©licat. Louis croyait, et non sans motif, au projet de le faire assassiner dans une Ă©meute populaire, s’il rĂ©cusait l’assemblĂ©e.
En se laissant juger par elle, il voulut Ă©pargner au peuple l’imputation d’un crime atroce. Ce fut l’explication qu’il donna Ă M. de Malesherbes. Cet homme vertueux lui ayant annoncĂ© l’intention manifestĂ©e par plusieurs personnes de ne pas le laisser pĂ©rir : « Les connaissez-vous ? lui dit le Roi changeant de couleur. Retournez Ă l’assemblĂ©e ; tĂ¢chez de les rejoindre, d’en dĂ©couvrir quelques-uns ; dites-leur que je ne leur pardonnerais pas, s’il y avait une seule goutte de sang versĂ© pour moi : j’ai refusĂ© d’en rĂ©pandre, quand peut-Ăªtre il m’eĂ»t conservĂ© le trĂ´ne et la vie... ; je ne m’en repens pas... ; non, monsieur, je ne m’en repens pas».
Sa famille Ă©tait l’unique objet de ses alarmes. Les souffrances actuelles des siens, la pensĂ©e du sort qui les menaçait, pouvaient seules lui arracher quelquefois des gĂ©missements, et altĂ©rer momentanĂ©ment son courage.
Ce fut son ancien ministre qui lui annonça l’arrĂªt fatal. Louis Ă©tait assis dans l’obscuritĂ©, le dos tournĂ© Ă une lampe placĂ©e sur la cheminĂ©e, les coudes appuyĂ©s sur une petite table, le visage couvert de ses deux mains. Le bruit que fit Malesherbes en entrant tira le roi de sa profonde mĂ©ditation. Il regarda fixement son dĂ©fenseur, et se levant de sa chaise : « M. de Malesherbes, lui dit-il, je suis occupĂ© depuis deux heures Ă rechercher si, pendant le cours de mon règne, j’ai mĂ©ritĂ© de mes sujets le plus lĂ©ger reprochĂ©. HĂ© bien ! je vous le jure dans toute la vĂ©ritĂ© de mon cÅ“ur, comme un homme qui va paraĂ®tre devant Dieu, j’ai constamment voulu le bonheur du peuple ; je n’ai jamais formĂ© un vÅ“u qui lui fĂ»t contraire. »
Louis XVI reçut son arrĂªt avec fermetĂ© : il consolait ses serviteurs ; il ne craignait pas la mort ; mais il pressentait avec douleur la terrible destinĂ©e de la reine, et le malheur de sa famille : il dĂ©plorait l’avenir prochain qui lui montrait le peuple livrĂ© Ă l’anarchie, devenant la proie de toutes les factions, les crimes se succĂ©dant, de longues dissensions dĂ©chirant la France.
Malesherbes eut la permission de le revoir. Louis l’embrassa deux fois en lui disant le dernier adieu. Ce vĂ©nĂ©rable citoyen, cet ami constant de son pays et de son prince, cet adversaire courageux du despotisme sous tous les rĂ©gimes, ne devait pas tarder Ă le suivre sur l’Ă©chafaud, auquel le plus gĂ©nĂ©reux dĂ©vouement n’avait pu arracher le chef d’une antique dynastie.
Le dĂ©cret fut notifiĂ© au Roi, dans les formes, par GarĂ¢t, ministre de la justice, accompagnĂ© de Lebrun, ministre des relations extĂ©rieures, de Grouvelle, secrĂ©taire du Conseil exĂ©cutif, de deux membres du dĂ©partement, et de Chambon, maire de Paris. Santerre le brasseur, qui commandait la garde nationale, l’accusateur public, et le prĂ©sident du tribunal criminel, Ă©taient aussi prĂ©sents. Louis entendit la lecture de son arrĂªt avec calme et dignitĂ©. Il s’avança vers Grouvelle, prit le dĂ©cret, tira son portefeuille et l’y plaça ; puis, prĂ©sentant un papier ouvert Ă GarĂ¢t, il le pria de le remettre sur-le-champ Ă l’AssemblĂ©e nationale. GarĂ¢t paraissant hĂ©siter, Louis lui en donna lecture : il demandait un dĂ©lai de trois jours pour se prĂ©parer Ă paraĂ®tre devant la majestĂ© de Dieu ; Ă pouvoir communiquer librement avec la personne qu’il indiquerait, et qui devrait Ăªtre mise Ă l’abri de toute crainte pour l’acte de charitĂ© qu’elle exercerait auprès de lui ; Ă Ăªtre dĂ©livrĂ© de la surveillance perpĂ©tuelle, Ă©tablie depuis quelques jours par le Conseil de la commune ; enfin, Ă voir librement et sans tĂ©moins sa famille.
Il recommandait Ă la bienfaisance de la nation les personnes qui avaient Ă©tĂ© attachĂ©es Ă son service, insistant sur leur fĂ¢cheuse position. Louis remit au ministre l’adresse de M. Edgeworth de Firmont, respectable ecclĂ©siastique qu’il avait choisi pour appui dans ces derniers moments.
La Convention autorisa ce choix, permit Ă Louis XVI de voir sans tĂ©moins sa famille, et refusa le sursis : ce prince ne songea plus qu’Ă se prĂ©parer Ă la mort. Qui pourrait dĂ©peindre la scène dĂ©chirante de ses adieux Ă sa famille ? Il est des douleurs dont il ne faut pas rĂ©veiller la mĂ©moire. Louis, après s’Ăªtre entretenu avec son confesseur jusqu’Ă minuit, se coucha, et dormit jusqu’Ă cinq heures, moment qu’il avait fixĂ© pour son rĂ©veil : il fit toutes ses dispositions avec beaucoup de sang-froid ; entendit avec le plus grand recueillement la messe que cĂ©lĂ©bra l’abbĂ© de Firmont, et reçut la communion de ses mains.
La nuit règne encore, dit l’un des historiens de cette funeste Ă©poque, et le bruit des tambours, des chevaux, des canons, rĂ©pand dans les rues une terreur profonde.
Tout ce qui n’est pas employĂ© pour le service du jour Ă©vite de se montrer ; les habitants, retirĂ©s chez eux, laissent un grand vide dans les lieux les plus frĂ©quentĂ©s : Paris ressemble pendant plusieurs heures Ă une vaste solitude.
A neuf heures les portes de la chambre du Roi s’ouvrent avec fracas ; Santerre, accompagnĂ© de huit officiers municipaux, entre Ă la tĂªte de dix gendarmes qu’il range sur deux lignes.
Louis XVI, après quelques minutes d’entretien avec son confesseur, prĂ©senta un Ă©crit (c’Ă©tait son testament) au prĂªtre Jacques Roux, officier municipal, en le priant de le remettre Ă la reine... Ă sa femme, dit-il, en se reprenant. « Je n’ai d’autre mission que de vous conduire au supplice, rĂ©pond ce prĂªtre. — C’est juste, rĂ©plique le Roi, et il remet cet Ă©crit Ă un autre commissaire, qui veut bien s’en charger. Je vous prie, dit-il Ă ces dĂ©lĂ©guĂ©s municipaux, de recommander Ă la Commune les personnes qui ont Ă©tĂ© Ă mon service, et de lui tĂ©moigner mon dĂ©sir que ClĂ©ry, Ă qui mon fils est accoutumĂ©, reste près de lui. » Puis, se retournant vers le chef de la force armĂ©e : « Marchons, » lui dit-il.
Il descendit de la Tour, traversa Ă pied la première cour de sa prison, et monta ensuite dans une voiture avec son confesseur : il Ă©tait escortĂ© de plusieurs dĂ©tachements de cavalerie ; on traĂ®nait devant et derrière lui un grand nombre de canons, avec un horrible fracas. Les individus de la classe populaire, attirĂ©s par la curiositĂ© sur les boulevards que suit le cortège, et Ă l’entrĂ©e des rues aboutissantes, errent isolĂ©s et dans un morne silence. Le Roi Ă©tait sorti
[de la prison de la Tour] du Temple Ă neuf heures quelques minutes, il arriva sur
la place nommée alors de la Révolution à dix heures dix minutes.
Louis employa tout le temps du trajet Ă rĂ©citer les prières des agonisants, ou Ă lire dans un livre de piĂ©tĂ©. Un chapeau rond, qui ombrageait sa figure, ne permit pas d’en observer toujours l’expression ; mais dans les intervalles oĂ¹ l’on put dĂ©mĂªler ses traits, on remarqua Ă travers sa tristesse un fond de sĂ©rĂ©nitĂ© : son teint n’Ă©tait nullement altĂ©rĂ©.
Parvenu au pied de l’Ă©chafaud, il s’entretint quelques minutes avec l’abbĂ© Edgeworth, quitta ensuite lui-mĂªme sa redingote, dĂ©lia ses cheveux, Ă´ta sa cravate, ouvrit sa chemise pour dĂ©couvrir son col et ses Ă©paules, et se mit Ă genoux pour recevoir la dernière bĂ©nĂ©diction de son confesseur. AussitĂ´t il se releva, et franchit de pied ferme les degrĂ©s de l’Ă©chafaud. « Fils de saint Louis, montez au ciel, » lui cria, dit-on, cet ecclĂ©siastique.
L’abbĂ© Edgeworth, Ă qui l’on rappelait souvent ces paroles, ne les a ni avouĂ©es ni dĂ©menties. Il en avait perdu le souvenir : mais elles entrent trop bien dans l’esprit religieux de l’acte qui s’exĂ©cutait, du confesseur et de la victime, pour que l’histoire ne les consacre pas comme l’inspiration naturelle de ce terrible moment.
Louis, sur l’Ă©chafaud, demanda Ă parler au peuple. On lui dit qu’il fallait avant tout qu’il eĂ»t les mains liĂ©es et les cheveux coupĂ©s ; d’autres racontent que l’on voulut lui lier les mains par surprise : on redoutait sa force de corps ; car il passait pour l’un des hommes les plus robustes de France. « Les mains liĂ©es, » s’Ă©cria ce prince un peu brusquement : il opposait mĂªme de la rĂ©sistance. « Encore ce sacrifice, lui dit son confesseur ; JĂ©sus s’est laissĂ© lier par ses bourreaux. » Le roi, cĂ©dant aussitĂ´t, dit aux siens : « Faites tout ce qu’il vous plaira. »
Quand ses mains eurent Ă©tĂ© liĂ©es et ses cheveux coupĂ©s, Louis dit : « J’espère qu’Ă prĂ©sent on me permettra de parler ; » et, s’avançant sur le cĂ´tĂ© gauche de l’Ă©chafaud, il fit signe aux tambours de cesser. Alors, d’une voix forte, il s’Ă©cria : « Français, je meurs innocent ; je pardonne Ă mes ennemis ; je dĂ©sire que ma mort soit… » Un roulement de tambours, ordonnĂ© par Santerre, commandant de la force armĂ©e, ne permit pas d’en entendre davantage. On ajoute que ce fanatique dit au roi : « Je vous ai amenĂ© ici non pour haranguer, mais pour mourir. » AussitĂ´t les exĂ©cuteurs attachèrent la victime ; sa tĂªte tomba Ă dix heures vingt minutes : l’un des bourreaux la montra au peuple.
Ainsi pĂ©rit, Ă l’Ă¢ge de trente-huit ans quatre mois et vingt-huit jours, Louis, seizième du nom, dont les ancĂªtres rĂ©gnaient en France depuis plus de huit cents ans.
Secrets d'Histoire : Louis XVI meurt guillotiné.
Source : Éphémérides universelles, ou, Tableau religieux, politique, littéraire, scientifique et anecdotique, présentant un extrait des annales de toutes les nations et de tous les siècles, par A. V. Arnault [et autres] mises en ordre et publ. par É. Monnais. Mars 2012. Broché : 412 pages. Editeur : Nabu Press (16 mars 2012). Langue : Français. ISBN-10 : 1278308849. ISBN-13 : 978-1278308845
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