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Indonesia | 14 years on death row: Timeline of Mary Jane Veloso’s ordeal and fight for justice

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MANILA, Philippines — The case of Mary Jane Veloso, a Filipina on death row in Indonesia for drug trafficking, has spanned over a decade and remains one of the most high-profile legal battles involving an overseas Filipino worker. Veloso was arrested on April 25, 2010, at Adisucipto International Airport in Yogyakarta, Indonesia, after she was found in possession of more than 2.6 kilograms of heroin. She was sentenced to death in October – just six months after her arrest. Indonesia’s Supreme Court upheld the penalty in May 2011.

Robert Badinter : L'exécution de Roger Bontems

Robert Badinter (1928-2024), avocat pénaliste, professeur de droit, homme politique, ministre, était également un farouche opposant à la peine de mort. 

Nommé garde des Sceaux (ministre de la Justice) à la suite de l'élection de François Mitterrand à la présidence de la République en mai 1981, il déploya une énergie considérable pour obtenir l'abolition de la peine capitale, votée par le Parlement français dès le mois de septembre 1981.

En 1965, Robert Badinter et Jean-Denis Bredin fondèrent un cabinet d'avocats, au sein duquel il exerça jusqu'en 1981. Son combat idéologique, moral et philosophique contre la peine de mort prit une ampleur plus aiguë et plus militante après l'exécution de son client, Roger Bontems, le 28 novembre 1972.

Lors d'une mutinerie à la centrale de Clairvaux en 1971, deux détenus, Roger Bontems et Claude Buffet, prirent en otage une infirmière et un surveillant pénitentiaire. Lorsque la police prit d'assaut l'établissement, Buffet égorgea les deux otages. Badinter assura la défense de Bontemps, et bien qu'il fut établi au cours du procès que seul Buffet avait porté les coups mortels contre les otages, les jurés décidèrent de condamner les deux hommes à la peine capitale.

Ci-dessous, un extrait du livre de Robert Badinter, "L'exécution", un récit biographique sur l'affaire Buffet-Bontems dans lequel il narre les dernières minutes et l'éxécution par guillotine de Roger Bontems.

"Nous arrivâmes. La rue de la [prison de la] Santé était barrée des deux côtés par des policiers. Nous nous arrêtâmes devant le barrage, déclinâmes nos identités, comme chez le président de la République. Il fallait exhiber nos laissez-passer, nos cartes d'avocat. Je pensais qu'il y avait là beaucoup de monde, des gendarmes, des civils, des policiers autour de la grande porte. Nous pénétrâmes comme d'habitude par la petite porte sur le côté, par où passent les avocats, les visiteurs. Quelques mètres encore, une autre porte à franchir. J'entrai dans la cour. La guillotine était là.

"Je ne m'attendais pas à la trouver tout de suite devant moi. Je m'étais imaginé qu'elle serait cachée quelque part, dans une cour retirée. Mais c'était bien elle, telle que je l'avais vue, comme chacun de nous, sur tant de vieilles photographies et d'estampes. Je fus surpris cependant par les montants, très hauts, très minces qui se découpaient sur la verrière, derrière elle. Par contraste, le corps de la machine me parut plus petit, comme un coffre assez court, Mais telle quelle, avec ses deux grands bras maigres dressés, elle exprimait si bien la mort qu'elle paraissait la mort elle-même, devenue chose matérialisée, dans cet espace nu. L'impression était encore renforcée par le dais noir, immense, tendu comme un vélum ou un chapiteau sur toute la cour. Il cachait ainsi la guillotine aux regards qui, d'en haut, auraient pu plonger sur elle. Ce dais qui dérobait tout le ciel transformait la cour en une sorte de salle immense, où la guillotine se dressait seule, comme une idole ou un autel maléfique. Les aides s’affairaient autour d'elle. Le symbole était aussi la machine. Et cet aspect mécanique, utilitaire, confondu avec la mort qu'elle exprimait si fortement, rendait la guillotine ignoble et terrible.

"Je passai à côté d'elle me refusant à ralentir ou à presser le pas, à la contempler ou à l'esquiver. Elle était bien le terme de Clairvaux. Buffet ne s'y était jamais trompé.

"Nous montâmes les marches derrière elle, qui menaient au bâtiment de l'administration. Nous gagnâmes le bureau du directeur. Il était plein de monde. 

(...)

Roger Bontems
"Bientôt cinq heures. Il fallait faire vite. Le directeur, courtoisement, me prit à part. Il y avait un problème. Lequel donc ? Qui allait-on exécuter en premier ? Buffet ou Bontems ? Une voix à côté de moi suggéra Buffet. Il y était préparé, il n'y aurait pas d'histoires. Je dis au directeur que j'allais en parler avec mes amis. C'était à nous de choisir. Nous nous retirâmes dans le couloir. Je posai la question. L'accord se fit aussitôt. Buffet attendait la mort. Bontems la grâce. Buffet ne pouvait fléchir. Quelle serait la réaction de Bontems ? Il fallait donc que pour lui l'attente soit la plus brève possible, que les choses aillent vite, très vite. Bontems passerait le premier. Je rapportai notre décision au directeur de la Santé. Il me regarda, parut préoccupé, mais ne dit rien. Peut-être avions-nous empiété sur la prérogative du bourreau, ou bien était-il choqué que ce soient les avocats qui décident du tour de la mort de leurs clients ? Nous étions au-delà des délicatesses. Nous avions gagné quelques minutes à vivre pour Bontems. C'était notre succès. Le seul.

"Je ne pouvais plus supporter ce bureau, ces présences. Je regagnai le couloir. L'aumônier de la Santé était assis sur une banquette, en complet gris foncé, à col rond. Je pris place à ses côtés. Il me demanda : "C'est votre première exécution ?" J'acquiesçai. C'était aussi son cas.

"Un monsieur couperosé passa, le chapeau sur la tête, suivi du directeur. Il avait l'air mécontent. C'était le bourreau. J'entendis : "Il faut y aller, il est temps." J'avais très chaud dans ce corridor. J'enlevai mon pardessus, allai le poser dans le bureau du directeur. Tout le monde en sortait en désordre. Je me hâtai de rejoindre le groupe, qui marchait à pas pressés. Nous franchîmes la première porte, entrâmes dans la rotonde. Je cherchai des yeux le surveillant-chef. Il n'était pas là. La marche s'accéléra encore. Les gardiens ouvraient les grilles très vite, nous avancions à grands pas, nous courions presque dans le couloir. C'était grotesque et sinistre à la fois. Le cortège s'immobilisa. Nous étions arrivés devant la cellule de Bontems. Un gardien faisait jouer le verrou à toute force. La porte s'ouvrit tout grand, la lumière jaillit. Bontems sauta du lit, torse nu. Il retenait son caleçon d'une main, ses yeux clignotaient. Je le vis sourire et j'entendis : "Alors c'est oui ou c'est non ?" Déjà la procureur de la République était dans la cellule. Il disait la phrase rituelle, du moins je le crois, car dans la confusion, il ressortait tandis que nous entrions Philippe et moi dans la cellule, avec des gardiens.

Robert Badinter
"Alors commença une chose extraordinaire. Philippe prit Bontems par le cou et lui parla. Ce n'était pas un discours, mais une incantation verbale où, sans cesse, revenait le mot courage. "Tu es bien, tu es formidable, tu as du courage." Je ne sais pas si Bontems comprenait tout ce que Philippe lui disait, à phrases décousues. Mais elles entraient en lui, le protégeaient, écartant la réalité. Seule importait la voix amicale, les mots familiers, cette tendresse secrète qui faisait irruption, dans cette cellule, et berçait Bontems au moment de mourir. Ce que Philippe accomplit en cet instant dépassa tout ce qu'un avocat peut espérer jamais atteindre au service de la défense. Il interdit à l'horreur d'entrer, il ferma Bontems à la peur, à l'angoisse, le protégea contre tant d'ignominie, comme une mère son petit. Et Bontems, magnétisé par cette tendresse, cette force que Philippe déversait en lui, continuait de sourire. Il avait mis ses lunettes, il enfilait sa chemise. Il voulait se rouler une cigarette, ne trouvait plus le tabac. Nous nous fouillons. Un gardien, vite, lui en tendit une déjà allumée. Maintenant, il était maître de lui, et, parce qu'il allait mourir, de nous aussi qui l'entourions. 

(...)

"Le gardien-chef, celui qui avait donné la cigarette, nous fit signe. Il était temps de quitter la cellule. Nous repartîmes, à travers les couloirs, les grilles ouvertes. Des gardiens ouvraient la voie, Bontems derrière eux, Philippe le bras autour de ses épaules, lui parlant toujours à voix basse. A la rotonde, il y avait déjà du papier, un stylo, des enveloppes tout prêts sur la table. Bontems s'assit. Il hésitait, la pointe levée. (...) Ce fut bref. Il devait sentir autour de lui cette hâte d'en finir, ou bien il ne voulait pas laisser la pensée de ses parents monter en lui, à cet instant. Philippe avait toujours la main sur son épaule. Bontems se leva, lui remit la lettre. Nous reprîmes notre marche jusqu'à la prochaine station.

"Dans une sorte de bas-côté, l’aumônier avait dressé l'autel. Le Christ tendait ses bras vers les grilles. Deux gardiens s'étaient placés chacun d'un côté du bureau recouvert du linge sacré, un peu en retrait, étrange présence en cet instant. L'aumônier attendait Bontems. Il le mena dans le fond, derrière l'autel. Nous nous arrêtâmes. Bontems était tout proche du prêtre. Il se confessait sans doute. A présent le prêtre lui parlait. Tout était silencieux. Je me retournai. Il y avait là des gardiens, des policiers, des gendarmes et le bourreau qui avait gardé son chapeau sur la tête. (...) Tous, et sans doute moi aussi, montraient une sorte de rictus. La lumière électrique durcissait encore leurs traits. Ils avaient tous à cet instant des gueules d'assassins. Seuls le prêtre et Bontems, qui recevait l'absolution, avaient encore des visages d'hommes. Le crime avait changé de camp.

"Bontems revint ver nous. Nous reprîmes encore une fois notre marche. Devant la porte vitrée, celle qui ouvrait sur la cour, une chaise était posée. Devant elle, nous nous arrêtâmes. Le gardien-chef, qui avait donné la cigarette, s'approcha, une bouteille à la main. C'était du cognac, Bontems accepta, vida le gobelet d'un seul trait. Et puis, à partir de cet instant, tout alla très vite. Le bourreau s'approcha. Bontems lui appartenait totalement enfin. Les aides, en bleu de chauffe, entourèrent Bontems. Il fut assis sur une chaise, ligoté, redressé, on tirait sur les liens à coups secs. Philippe lui parlait, il hochait la tête. Il fut empoigné. Philippe l'étreignit, je l'embrassai à mon tour. Déjà on l'entraînait. Je tendis la main vers lui, vers cette épaule nue, mais il était happé, emporté. La porte s'ouvrit. Philippe laissa échapper une plainte, la seule. Je me détournai. Nous entendîmes le claquement sec de la lame sur le butoir. C'était fini."

👉🏻 Extrait de L'Exécution, de Robert Badinter. Editions Grasset, 1973. L'ouvrage de Robert Badinter est disponible en ligne ici (format poche ou Kindle). Lien commercial fourni à titre indicatif sans but lucratif.

Illustration : La scène de l'exécution, tirée du film "Deux hommes dans la ville", de José Giovanni, avec Alain Delon et Jean Gabin (1973)

Source: Death Penalty News, Editor, February 16, 2024

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